Théories, idées, morales, etc.
Ces êtres humains qui, bien que plus intelligents, beaux et fascinants que la moyenne, sont tout de même perdu dans leurs quête d'un but à la vie. Ce but apparaît comme,peut être, la connaissance dans les réflexions d'Albert, le sexe dans l'abandon totale d'Heide à ce dernier, et la provocation, l'ignorance des bornes dans la violence des actions d'Herminien, qu'elle soit physique sur Heide ou verbale, musicale(le concert d'orgue qui laisse son ami sous le choc) avec Albert. La réponse semble résider dans les coup de poignards d'Albert sur Heide et Hermienien, mais son geste peut aussi revêtir la symbolique de l'inéluctable des rapports humains, qui ne peuvent que finir dans l'effacement de l'autre.
Prose poétique?
Mais la longueur des phrases rompt avec ces aspects poétiques, en instaurant une dynamique de flux ou de cours d'eau, ondulant et s'étirant sans se donner des limites versifiées tout en respectant soigneusement l'aspect grammatical et logique de la langue.
Procédés repérés
Récit
(comme un homme)
Julien Gracq naît sur les bords de la Loire, dans un village éloigné des cercles littéraires et des parades mondaines. Très marqué par le pensionnat de son enfance, il fréquente d'abord un lycée de Nantes mais part au célèbre lycée Henri IV à Paris, puis fait l'Ecole normale supérieure et l'Ecole libre des sciences politiques. Normalien agrégé d'histoire, Julien Gracq commence à enseigner alors qu'il écrit 'Au château d'Argol'. Il exerce sa fonction de professeur sous son vrai nom, Louis Poirier, et utilise celui de Gracq pour ses activités littéraires. Entre autres pièces de théâtre et poèmes en prose, il est notamment l'auteur de 'Le Rivage des Syrtes' pour lequel il obtient le prix Goncourt 1951. Prix qu'il refuse, écoeuré par un certain milieu mondain intellectuel(qu'il caricature dans son essai 'Littérature à l'estomac'). Julien Gracq, écrivain exceptionnel et critique littéraire reconnu, s'éteint en 2007 à l'âge de 97 ans.
Thème astral de J.G.(27 juillet 1910)
in the mood
Au château d’Argol est le premier roman qu'écrivit Julien Gracq, durant l'été 1937. Il propose son manuscrit à Gallimard, mais ne fait plus d'autres démarche quand celui le refuse. En rencontrant par hasard José Corti, un éditeur-libraire côtoyant le milieu surréaliste, il pourra le faire publier en 1938.
Ce premier livre se pose en introduction d'une oeuvre diverse et évolutive, mais en est coupé car écrit avant la guerre, où Julien Gracq sera mobilisé puis capturé. De plus, ceux qui suivront seront l'objet d'une évolution dans un style moins contourné, ou moins archaïque, et ainsi plus précis afin de frapper au mieux la vision et l'imagination du lecteur.
" (...) Au Château d'Argol (...) a été écrit avec une sorte d'enthousiasme, qui tenait peut-être en partie à ce que je débouchais tardivement dans la fiction (...).
Entretien avec Julien Gracq, Magazine littéraire, décembre 1981.
Julien Gracq a été inspiré pour sa première fiction par l'opéra ou « festival scénique sacré » Parsifal de Wagner, et ce récit pourrait, selon lui, « (...) passer pour n’être qu’une version démoniaque – et par là parfaitement autorisée – du chef-d’œuvre [donc, Parsifal de Wagner](...) »(citation extraite de l’avis au lecteur écrit par Julien Gracq)
Ce livre est aussi le premier roman surréaliste tel que André Breton le rêvait. Il est l'un des rares lecteurs du livre lors de sa sortie,où seule une centaine d'exemplaires est vendue(sur 1200 imprimés) et est admiratif de sa propension à laisser «pour la première fois, le surréalisme se retourn[er] librement sur lui-même pour se confronter avec les grandes expériences sensibles du passé et évaluer,(...) sous l'angle de l'émotion (...)[et] de la clairvoyance, ce qu'a été l'étendue de sa conquête. »
Les sens sont irrigués par les lieux, les espaces et forment l’image la plus exacte des relations entre Albert le maître d’Argol, Herminien son ami, son complice, son ange noir, et Heide, la femme, le corps. Tout autour, sombre, impénétrable, la forêt. Tout près, l’océan. Et au centre, troublant point de repère, le château d'Argol.
(En haut à gauche, la première page du livre, de la main de Gracq. )